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femelles qui couvaient sans se déranger, mais peu à peu les mâles arrivèrent pour se reposer de leur chasse nocturne ; c’est à cause de leurs habitudes et aussi à cause de leur cri que les anciens naturalistes les ont appelés nycticorax, corbeaux de nuit. Ils appartiennent à la même famille que les hérons ; leur vrai nom est bihoreaux. Leur plumage est épais, et leur vol est sans bruit comme celui des oiseaux nocturnes. Cependant, lorsqu’ils ont des petits, ils chassent aussi le jour ; mais il n’y en avait pas encore de nés dans la colonie, et ces messieurs y venaient dormir après avoir fait manger ces dames. Clopinet, qui, les voyant d’abord en dessous, les avait crus tout blancs, reconnut qu’ils n’avaient de blanc que le cou et le ventre. Leurs ailes étaient gris de perle ; un joli manteau vert sombre leur couvrait le dos, et de leur bonnet, vert aussi, tombait sur le dos, cette longue et fine aigrette invariablement composée de trois plumes. Les mâles seuls paraissaient avoir cette riche coiffure ; cependant Clopinet vit que plusieurs ne l’avaient pas encore ou ne l’avaient plus. C’était le moment de la mue, et beaucoup de ces plumes précieuses, éparses sur les rochers, étaient le jouet du vent. Clopinet ne bougea pourtant pas pour les ramasser, voulant voir les habitudes de ces rôdeurs de nuit, qui, sans faire attention à lui, apportaient aux couveuses les poissons, coquillages et insectes qu’ils avaient pris. Le repas terminé, ils s’aperçurent de la présence de l’étranger, et tous en même temps, avertis par le cri de l’un d’eux, tournèrent la tête de son côté.