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— Certainement, répondit le boulanger, et même deux, et même trois, si tu as la force de les emporter.

— Eh bien ! donnez-m’en trois, reprit Clopinet, je les porterai bien.

— Il y a donc bien du monde à nourrir chez vous ?

— Apparemment, répondit l’enfant, qui ne voulait pas faire de mensonges.

— Oh ! oh ! tu es bien fier ! Tu n’aimes pas à causer ? Tu ne veux pas dire qui tu es et où tu demeures, car je ne te connais point, et tu n’es pas du pays ?

— Non, je ne suis point d’ici, répondit Clopinet ; mais je n’ai pas le temps de causer. Donnez-moi mes trois pains, s’il vous plaît, et dites-moi ce qu’il faut vous donner d’argent.

— Ah dame ! ça fait de l’argent, car le pain est très-cher ici ; mais, si tu veux me donner les trois plumes que tu as à ton bonnet, tu pourras revenir tous les dimanches pendant un mois chercher autant de pain qu’aujourd’hui sans que je te demande d’argent. Tu vois que je suis raisonnable, et tu dois être content.

Clopinet crut d’abord que le boulanger se moquait de lui ; mais, comme cet homme insistait, il lui vint tout à coup assez de jugement dans l’esprit pour se dire que ses trois plumes devaient être quelque chose de rare et que c’était cela que le monde regardait et non pas lui. Il les ôta vitement, et le boulanger tendait déjà la main pour les prendre quand Clopinet, qui ne tenait pas à l’argent, parce qu’avec