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les rameaux et travailla chez lui (il disait déjà chez moi) à se faire un beau grand panier assez solide. Il se fit aussi un lit excellent avec des algues que la mer apportait sur le rivage. Enfin il s’imagina de chasser, et, comme il était adroit à lancer des pierres, il abattit, après l’avoir guettée longtemps, une perdrix de mer qu’il voyait courir et jouer sur la grève. C’était un joli oiseau très-gras ; il s’agissait de le faire cuire. Clopinet n’était pas embarrassé pour allumer du feu. Il avait dans son paquet une chose que dans ce temps-là on appelait un fusil, et dont tout le monde était muni en voyage. C’était un anneau de fer et un morceau d’amadou. Avec un caillou, on avait du feu presque aussi vite qu’à présent. Il fit un tas de feuilles et de broussailles sèches, et réussit à cuire son oiseau. Je ne réponds pas que la chair fût bien bonne et ne sentît pas la fumée, mais il la trouva excellente et regretta de ne pouvoir en offrir une aile à sa mère et une cuisse à son frère François. La perdrix de mer n’est point du tout une perdrix, c’est plutôt une hirondelle. Elle vit de coquillages et non de grain. Elle est très-jolie avec son bec et son collier, qui ressemblent un peu en effet à ceux des perdrix. Elle est à peu près grosse comme un merle. On voit que Clopinet ne risqua pas d’avoir une indigestion.

Il avait vu, en chassant ce gibier, beaucoup d’autres oiseaux qui l’avaient bien tenté, des guignettes, des pluviers, des alouettes de mer, qui ne sont pas non plus des alouettes, mais qui sont une sorte de petits bécasseaux, — des huîtriers ou pies de mer,