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— Sais-tu filer très-fin ?

— Mais… oui, assez fin.

— Elle est la première fileuse de chez nous, dit Sylvaine avec orgueil, et on lui apporterait n’importe quoi à filer qu’elle en viendrait à bout.

— Filerait-elle bien des toiles d’araignée ? dit la tante Colette.

Catherine pensa qu’elle se moquait et répondit en riant : — Dame ! dame ! je n’ai jamais essayé.

— Voyons comment tu files, reprit la grand’tante en lui mettant au côté une quenouille d’ébène et en lui donnant un petit fuseau monté en argent.

— Voilà bien de jolis outils ! dit Catherine en admirant la finesse de la quenouille, qui était droite comme un jonc, et le fuseau, léger comme une plume ; mais pour filer, ma tante, il faut avoir quelque chose à mettre sur la quenouille.

— On trouve toujours quelque chose quand on a de l’invention, répondit la tante.

— Je ne vois pourtant rien ici à filer, reprit Catherine, car vous parliez de toile d’araignée, et votre maison est trop bien époussetée pour qu’il y en ait un brin.

— Et dehors, Catherine ? puisque te voilà sur le pas de la porte, ne vois-tu rien du tout à mettre sur ta quenouille ?

— Non, ma tante, car il faudrait que l’écorce des arbres fût broyée et la laine des moutons cardée… et à moins de filer ces nuages qui sont là haut sur le glacier et qui ont l’air de grosses balles de coton…