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Le cloître à arcades avait été débarrassé de ses décombres et de ses plantes sauvages, l’intérieur était devenu un jardin potager, et la source, privée de ses menthes et de ses scolopendres, disparaissait, captive, sous une margelle de puits. Les poules grattaient le fumier dans une petite cour voisine, qui avait été la salle des étuves et qui était encore dallée en porphyre ; une allée de mûriers fraîchement plantés, qui ne paraissaient pas bien décidés à s’accommoder du terrain et du climat, descendait au chemin neuf sans passer par l’ancien parc, ni par les ruines. Les châtelains de Pictordu, en se glissant dans un coin du nid de leurs ancêtres, avaient fait tout leur possible pour lui tourner le dos et ne jamais le traverser.

En admirant par complaisance le parti que Blanche avait su tirer de ce reste d’habitation, Diane soupirait en songeant au parti bien différent qu’elle en eût tiré elle-même. Mais Blanche paraissait si fière et si satisfaite de ses arrangements, qu’elle se garda bien de rien critiquer. Le marquis et son gendre arrivèrent bientôt pour souper, le gendre, rouge et hâlé, appelant ses chiens, parlant d’un voix vibrante et riant aux éclats après chaque phrase, sans qu’on pût deviner ce qu’il avait dit de réjouissant ; le marquis, toujours poli, affectueux, effacé, mélancolique. Il fit à Diane l’accueille plus aimable, il n’avait rien oublié de sa première visite. Et puis il l’accabla de questions singulières auxquelles il était impossible de répondre sans entrer dans des explications comme on en donnerait à un enfant. Ce