Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/233

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tu es une enfant esclave de l’ignorance, et je perdrais mon temps à te le démontrer.

— Voyons, repris-je, vous paraissez vouloir parler raison pour la première fois. Expliquez-moi vos paroles.

— Je ne puis te parler ici, répondit-elle. J’en ai trop long à te dire, et, sitôt que je m’installe quelque part chez vous, on me balaye avec mépris ; mais, si tu veux savoir qui je suis, appelle-moi par trois fois cette nuit, aussitôt que tu seras endormie.

Là-dessus, elle s’éloigna en poussant un grand éclat de rire, et il me sembla la voir se dissoudre et s’élever en grande traînée d’or, rougi par le soleil couchant.

Le même soir, j’étais dans mon lit et je pensais à elle en commençant à sommeiller.

— J’ai rêvé tout cela, me disais-je, ou bien cette petite vieille est une vraie folle. Comment me serait-il possible de l’appeler en dormant ?

Je m’endormis, et tout aussitôt je rêvai que je l’appelais. Je ne suis même pas sûre de n’avoir