Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/212

Cette page n’a pas encore été corrigée

de son ossature ne sont pas plus des êtres par eux-mêmes qu’une phalange de nos doigts ou une portion de notre crâne n’est un être humain.

C’était pourtant un beau caillou, et ne croyez pas que vous eussiez pu le mettre dans votre poche, car il mesurait peut-être un mètre sur toutes ses faces. Détaché d’une roche de cornaline, il était cornaline lui-même, non pas de la couleur de ces vulgaires silex sang de bœuf qui jonchent nos chemins, mais d’un rose chair veiné de parties ambrées, et transparent comme un cristal. Vitrification splendide, produite par l’action des feux plutoniens sur l’écorce siliceuse de la terre, il avait été séparé de sa roche par une dislocation, et il brillait au soleil, au milieu des herbes, tranquille et silencieux, depuis des siècles dont je ne sais le compte. La fée Hydrocharis vint enfin un jour à le remarquer. La fée Hydrocharis (beauté des eaux) était amoureuse des ruisseaux tranquilles, parce qu’elle y faisait pousser ses plantes favorites, que je ne vous nommerai pas, vu que vous les connaissez maintenant et que vous les chérissez aussi.