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écus gagnés par lui que le fermier lui avait remis la veille et dont sa tante n’avait pas encore eu le temps de le dépouiller, une peau de chèvre et une peau de mouton dont il se servait l’hiver, un couteau neuf, un petit pot de terre, un peu de linge fort déchiré. Il mit le tout dans son sac, descendit dans la cour, escalada la barrière et s’en alla à petits pas pour ne pas faire de bruit ; mais, comme il passait près de l’étable à porcs, ces maudites bêtes le sentirent ou l’entendirent et se prirent à crier avec fureur. Alors, Emmi, craignant que les fermiers, réveillés dans leur premier sommeil, ne se missent à ses trousses, prit sa course et ne s’arrêta qu’au pied du chêne parlant.

— Me voilà revenu, mon bon ami, lui dit-il. Permets-moi de passer encore une nuit dans tes branches. Dis si tu le veux !

Le chêne ne répondit pas. Le temps était calme, pas une feuille ne bougeait. Emmi pensa que qui ne dit mot consent. Tout chargé qu’il était, il se hissa adroitement jusqu’à la grosse enfourchure où il avait passé la nuit précédente, et il y dormit parfaitement bien.