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fois. Personne ne m’avait encore appris en quoi consiste le beau dans la nature. Je le sentis pour ainsi dire physiquement, et, comme j’avais mis pied à terre pour faciliter la montée au petit cheval, je restai immobile, oubliant de suivre le cavalier. – Eh bien, eh bien, me cria maître Jean, que faites-vous là-bas, imbécile ?


Je me hâtai de le rejoindre et de lui demander le nom de l’endroit si drôle, où nous étions.

— Apprenez, drôle vous-même, répondit-il, que cet endroit est un des plus extraordinaires et des plus effrayants que vous verrez jamais. Il n’a pas de nom que je sache, mais les deux pointes que vous voyez là, c’est la roche Sanadoire et la roche Tuilière. Allons, remontez, et faites attention à vous.


Nous avions tourné les roches et devant nous s’ouvrait l’abîme vertigineux qui les sépare. De cela, je ne fus point effrayé. J’avais gravi assez souvent les pyramides escarpées des monts Dômes pour ne pas connaître l’éblouissement de l’espace. Maître Jean, qui n’était pas né dans la montagne