Page:Sand - Contes d’une grand’mère, 1906.djvu/139

Cette page n’a pas encore été corrigée

» Une nuit, malade moi-même, épuisé de veilles et succombant à la fatigue, je dormis profondément durant quelques heures. À mon réveil, je ne vis plus Aor sur sa couche et je l’appelai en vain. Éperdu, je sortis dans le jardin, je cherchai au bord de l’étang. Mon odorat me fit savoir qu’Aor n’était point là et qu’il n’y était pas venu récemment. Grâce à la négligence qui avait gagné mes serviteurs, je pus ouvrir moi-même les portes de l’enclos et sortir des palissades. Alors je sentis le voisinage de mon ami et m’élançai dans un bois de tamarins qui tapissait la colline. À une courte distance, j’entendis un cri plaintif et je me précipitai dans un fourré où je vis Aor lié à un arbre et entouré de scélérats prêts à le frapper. D’un bond, je les renversai tous, je les foulai aux pieds sans pitié. Je rompis les liens qui retenaient Aor, je le saisis délicatement, je l’aidai à se placer sur mon cou, et, prenant l’allure rapide et silencieuse de l’éléphant en fuite, je m’enfonçai au hasard dans les forêts.

» À cette époque, la partie de l’Inde où nous nous trouvions offrait le contraste heurté des