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consuelo.

qui prononça avec sa lugubre solennité ce mot sans appel : « C’est la mort ! »

CV.

Le comte Christian tomba comme foudroyé sur son fauteuil ; la chanoinesse, en proie à des sanglots convulsifs, se jeta sur Albert comme si elle eût espéré le ranimer encore une fois par ses caresses ; le baron Frédéric prononça quelques mots sans suite ni sens qui avaient le caractère d’un égarement tranquille. Supperville s’approcha de Consuelo, dont l’énergique immobilité l’effrayait plus que la crise des autres :

« Ne vous occupez pas de moi, monsieur, lui dit-elle, ni vous non plus, mon ami, répondit-elle au Porpora, qui portait sur elle toute sa sollicitude dans le premier moment. Emmenez ces malheureux parents. Soignez-les, ne songez qu’à eux ; moi, je resterai ici. Les morts n’ont besoin que de respect et de prières. »

Le comte et le baron se laissèrent emmener sans résistance. La chanoinesse, roide et froide comme un cadavre, fut emportée dans son appartement, où Supperville la suivit pour la secourir. Le Porpora, ne sachant plus lui-même où il en était, sortit et se promena dans les jardins comme un fou. Il étouffait. Sa sensibilité était comme emprisonnée sous une cuirasse de sécheresse plus apparente que réelle, mais dont il avait pris l’habitude physique. Les scènes de deuil et de terreur exaltaient son imagination impressionnable, et il courut longtemps au clair de la lune, poursuivi par des voix sinistres qui lui chantaient aux oreilles un Dies iræ effrayant.

Consuelo resta donc seule auprès d’Albert ; car à peine le chapelain eut-il commencé à réciter les prières de