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consuelo.

« Horrible métier ! pensa Consuelo. Non, je ne me laisserai pas séduire par les enivrements de la scène ; l’intérieur de la coulisse est trop immonde. »

Et elle se cacha dans son coin, humiliée de se trouver en pareille compagnie, indignée et consternée de la manière dont la Corilla l’avait comprise, et plongeant pour la première fois dans cet abîme de corruption dont elle n’avait pas encore eu l’idée.

XCVII.

En achevant sa toilette à la hâte, dans la crainte d’une surprise, elle entendit le dialogue suivant en italien :

« Que venez-vous faire ici ? Je vous ai défendu d’entrer dans ma loge. L’impératrice nous a interdit, sous les peines les plus sévères, d’y recevoir d’autres hommes que nos camarades, et encore faut-il qu’il y ait nécessité urgente pour les affaires du théâtre. Voyez à quoi vous m’exposez ! Je ne conçois pas qu’on fasse si mal la police des loges.

— Il n’y a pas de police pour les gens qui paient bien, ma toute belle. Il n’y a que les pleutres qui rencontrent la résistance ou la délation sur leur chemin. Allons, recevez-moi un peu mieux, ou, par le corps du diable, je ne reviendrai plus.

— C’est le plus grand plaisir que vous puissiez me faire. Partez donc ! Eh bien, vous ne partez pas ?

— Tu as l’air de le désirer de si bonne foi, que je reste pour te faire enrager.

— Je vous avertis que je vais mander ici le régisseur, afin qu’il me débarrasse de vous.

— Qu’il vienne s’il est las de vivre ! j’y consens.