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consuelo.

présence des hôtes de la nuit. Elle parcourut la montagne dans tous les sens, et n’y trouva aucun indice. Elle appela Zdenko de tous côtés : elle essaya de siffler pour voir si elle éveillerait les aboiements de Cynabre ; elle se nomma à plusieurs reprises ; elle prononça le nom de Consolation dans toutes les langues qu’elle savait ; elle chanta quelques phrases de son cantique espagnol, et même de l’air bohémien de Zdenko, qu’elle avait parfaitement retenu. Rien ne lui répondit. Le craquement des lichens desséchés sous ses pieds, et le murmure des eaux mystérieuses qui couraient sous les rochers, furent les seuls bruits qui lui répondirent.

Fatiguée de cette inutile exploration, elle allait se retirer après avoir pris un instant de repos sur la pierre, lorsqu’elle vit à ses pieds une feuille de rose froissée et flétrie. Elle la ramassa, la déplia, et s’assura bien que ce ne pouvait être qu’une feuille du bouquet qu’elle avait jeté à Zdenko ; car la montagne ne produisait pas de roses sauvages, et d’ailleurs ce n’était pas la saison. Il n’y en avait encore que dans la serre du château. Ce faible indice la consola de l’apparente inutilité de sa promenade, et la laissa de plus en plus persuadée que c’était au Schreckenstein qu’il fallait espérer de découvrir Albert.

Mais dans quel antre de cette montagne impénétrable était-il donc caché ? il n’y était donc pas à toute heure, ou bien il était plongé, en ce moment, dans un accès d’insensibilité cataleptique ; ou bien encore Consuelo s’était trompée en attribuant à sa voix quelque pouvoir sur lui, et l’exaltation qu’il lui avait montrée n’était qu’un accès de folie qui n’avait laissé aucune trace dans sa mémoire. Il la voyait, il l’entendait peut-être maintenant, et il se riait de ses efforts, et il méprisait ses inutiles avances.

À cette dernière pensée, Consuelo sentit une rougeur