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teau, connue de lui seul. Jusqu’ici on n’a pu le découvrir. Cela est d’autant plus difficile qu’on ne peut le surveiller, et qu’on le rend dangereusement malade quand on veut le suivre, l’observer, ou seulement l’interroger. Aussi a-t-on pris le parti de le laisser absolument libre, puisque ces absences, si effrayantes pour nous dans les commencements, nous nous sommes habitués à les regarder comme des crises favorables dans sa maladie. Lorsqu’elles arrivent, ma tante souffre et mon oncle prie ; mais personne ne bouge ; et quant à moi, je vous avoue que je me suis beaucoup endurcie à cet égard-là. Le chagrin a amené l’ennui et le dégoût. J’aimerais mieux mourir que d’épouser ce maniaque. Je lui reconnais de grandes qualités ; mais quoiqu’il vous semble que je ne dusse tenir aucun compte de ses travers, puisqu’ils sont le fait de son mal, je vous avoue que je m’en irrite comme d’un fléau dans ma vie et dans celle de ma famille.

— Cela me semble un peu injuste, chère baronne, dit Consuelo. Que vous répugniez à devenir la femme du comte Albert, je le conçois fort bien à présent ; mais que votre intérêt se retire de lui, je ne le conçois pas.

— C’est que je ne puis m’ôter de l’esprit qu’il y a quelque chose de volontaire dans la folie de ce pauvre homme. Il est certain qu’il a beaucoup de force dans le caractère, et que, dans mille occasions, il a beaucoup d’empire sur lui-même. Il sait retarder à son gré l’invasion de ses crises. Je l’ai vu les maîtriser avec puissance quand on semblait disposé à ne pas les prendre au sérieux. Au contraire, quand il nous voit disposés à la crédulité et à la peur, il a l’air de vouloir faire de l’effet sur nous par ses extravagances, et il abuse de la faiblesse qu’on a pour lui. Voilà pourquoi je lui en veux, et demande souvent à son patron Belzébuth de venir le chercher une bonne fois pour nous en débarrasser.