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consuelo.

les choses trop au sérieux. Je crains bien que dans peu de jours mon pauvre cousin ne vous inspire plus de pitié que de respect.

— L’un pourrait bien ne pas empêcher l’autre, reprit Consuelo ; mais expliquez-vous, chère baronne.

— Écoutez bien, dit Amélie. Nous sommes une famille très-catholique, très-fidèle à l’église et à l’empire. Nous portons un nom saxon, et nos ancêtres de la branche saxonne furent toujours très-orthodoxes. Si ma tante la chanoinesse entreprend un jour, pour votre malheur, de vous raconter les services que nos aïeux les comtes et les barons allemands ont rendus à la sainte cause, vous verrez qu’il n’y a pas, selon elle, la plus petite tache d’hérésie sur notre écusson. Même au temps où la Saxe était protestante, les Rudolstadt aimèrent mieux abandonner leurs électeurs protestants que le giron de l’église romaine. Mais ma tante ne s’avisera jamais de vanter ces choses-là en présence du comte Albert, sans quoi vous entendriez dire à celui-ci les choses les plus surprenantes que jamais oreilles humaines aient entendues.

— Vous piquez toujours ma curiosité sans la satisfaire. Je comprends jusqu’ici que je ne dois pas avoir l’air, devant vos nobles parents, de partager vos sympathies et celle du comte Albert pour la vieille Bohême. Vous pouvez, chère baronne, vous en rapporter à ma prudence. D’ailleurs je suis née en pays catholique, et le respect que j’ai pour ma religion, autant que celui que je dois à votre famille, suffiraient pour m’imposer silence en toute occasion.

— Ce sera prudent ; car je vous avertis encore une fois que nous sommes terriblement collets-montés à cet endroit-là. Quant à moi, en particulier, chère Nina, je suis de meilleure composition. Je ne suis ni protestante