— Oh ! ne me refuse pas cela, s’écria Anzoleto, tu me mettrais le désespoir et la fureur dans l’âme. »
Effrayée de son accent et de ses paroles, Consuelo n’osa refuser ; et quand elle eut allumé sa lampe et tiré ses rideaux, le voyant sombre et comme perdu dans ses pensées, elle entoura de ses bras le cou de son fiancé :
« Comme tu me parais malheureux et inquiet ce soir ! lui dit-elle tristement. Que se passe-t-il donc en toi ?
— Tu ne le sais pas, Consuelo ? tu ne t’en doutes pas ?
— Non ! sur mon âme !
— Jure-le, que tu ne devines pas ! Jure-le sur l’âme de ta mère, et sur ton Christ que tu pries tous les matins et tous les soirs.
— Oh ! je te le jure, sur mon Christ et sur l’âme de ma mère.
— Et sur notre amour ?
— Sur notre amour et sur notre salut éternel !
— Je te crois, Consuelo ; car ce serait la première fois de ta vie que tu ferais un mensonge.
— Et maintenant m’expliqueras-tu… ?
— Je ne t’expliquerai rien. Peut-être faudra-t-il bientôt que je me fasse comprendre… Ah ! quand ce moment sera venu, tu ne m’auras déjà que trop compris. Malheur ! malheur à nous deux le jour où tu sauras ce que je souffre maintenant !
— Ô mon Dieu, de quel affreux malheur sommes-nous donc menacés ? Hélas ! c’est donc sous le coup de je ne sais quelle malédiction que nous devions rentrer dans cette pauvre chambre, où nous n’avions eu jusqu’à présent aucun secret l’un pour l’autre ! Quelque chose me disait bien, quand je suis sortie ce matin, que j’y rentrerais la mort dans l’âme. Qu’ai-je donc fait pour ne pas jouir d’un jour qui semblait si beau ? N’ai-je pas prié Dieu ardemment et sincèrement ? N’ai-je pas éloigné de moi