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nents, appelés à venir juger et protéger leurs confrères des autres pays ou de la province, prirent tout naturellement l’habitude de cette maison confortable, animée, enjouée, dont la maîtresse avait l’art suprême de s’occuper de tous et de chacun, de mettre tout le monde à l’aise en ayant l’air de ne se tourmenter de rien et de s’amuser pour son propre compte.

Ce salon fut un des derniers vestiges de l’ancienne société française. De 1840 à 1855, en dépit des révolutions, il tint sans éclat, sans faste et sans prétentions une place choisie au milieu du monde. Il faut dire au milieu, parce que ce fut un petit point central où toutes les classes de la société furent simultanément représentées, et où les rangs et les opinions les plus contraires furent étonnés de se trouver face à face sans aigreur et sans querelles. On y venait par curiosité d’abord, et on y revenait par goût : dans la semaine, par petits groupes qui se questionnaient, se tâtaient pour ainsi dire, et se séparaient sans s’être entendus, mais sans s’être scandalisés ni haïs ; le lundi, par groupes plus nombreux qui arrivaient à faire masse, et que le plaisir d’entendre une bonne lecture ou d’excellente musique réunissait dans un sentiment commun d’approbation ou de plaisir.

Nous ne dirons rien de plus ici du couple Ortolani, sinon que le mari était estimé et la femme aimée. Celle-ci avait le cœur essentiellement bon et dévoué ; chez elle, l’art d’obliger était orné de toutes les grâces de l’esprit.