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les portons à la même ambulance que nos soldats ? Qui se dira le plus soumis aux lois naturelles, ou le plus affranchi des instincts de la brute ? Je ne sais pas quel Dieu étrange on veut faire cle la nature humaine, comme si elle était une chose absolue, immuable et sacrée par elle-même, tandis qu’elle est, en réalité, la chose la plus malléable et la plus éducable qui existe sous le ciel. Tenez, il y a de beaux systèmes là-dessus, et il y en a aussi de très-pernicieux ; mais je dirai, à un autre point de vue que la duchesse, que je ne m’embarrasse d’aucun. Le beau m’apparaît comme l’expression la plus élevée du vrai. Je le sens, je l’aime, il m’attire, il me charme, il se manifeste en moi en un très-petit nombre de préceptes qui me ravissent par leur grandeur et leur simplicité. Je m’exalte dans la joie de les comprendre et dans l’émotion de les adorer. Suis-je donc dans le faux et dans le rêve ? Je ne sens nullement la nature crier en moi que je me trompe. Chez l’homme qui se jette dans les flammes pour sauver un autre homme, et chez celui qui fuit l’incendie sans songer à personne, la nature humaine agit avec la même énergie, seulement elle agit différemment ; et cependant elle n’est pas deux, elle est une ; mais elle est héroïque ou lâche, selon qu’elle a monté vers l’idéal ou descendu vers l’instinct.

— J’entends, dit la Mozzelli. Vous pensez que l’idéal n’est pas au-dessus de la nature, et que tous peuvent l’atteindre quand ils l’aiment.