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et l’amour ne se sépareraient pas ou que l’univers périrait.

Ce que je vous dis de ces nuances diverses est si vrai, que vous avez été malheureuse, ma chère Sofia, pour avoir voulu imposer aux hommes que vous avez aimés votre manière de les aimer. J’ai compris cela aux aveux que vous avez faits de votre jalousie continuelle. Je crois qu’on rend un homme infidèle par le soupçon excessif de son infidélité, et que la violence de la passion chez une femme est quelque chose qui lui ôte la force et l’ascendant de sa véritable nature. Comme c’est une force toute de persuasion et de consolation, dès qu’elle usurpe les privilèges de la protection active, elle perd ses droits légitimes au bienfait de l’exclusive protection. Elle était la brise et la rosée, elle devient la bourrasque et la foudre. Elle était une faiblesse sacrée et vénérable, elle devient une énergie qui lutte contre le principe même de son énergie. L’homme sent que son vrai bien lui échappe, il résiste ou se lasse.

— Hélas ! vous avez raison, je le sens, répondit la Sofia, et si je pouvais recommencer ma vie, je la gouvernerais au lieu de me laisser emporter par elle ; mais il est trop tard ! Tout ce que vous me dites maintenant ne me paraît plus applicable à ma destinée. J’entends la théorie de l’amour dans la bouche d’une vierge, et je me dis qu’il y a, entre elle et moi, l’inconnu pour elle, le souvenir pour moi-même, deux choses que notre pensée ne peut pas franchir. Cet