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sement, des détails sans intérêt ici. Je sais qu’il a dû faire ce sacrifice à des devoirs de position qui lui sont sacrés, puisqu’ils lui ont été imposés par mon père et par sa propre dignité. Il veut non pas tenir de moi une fortune, mais m’en apporter deux : la sienne propre et la mienne, qui, doublée par ses soins, sera encore son œuvre et non pas son salaire. Je déplore, comme vous pouvez croire, cette richesse que sa fierté nous impose, et dont notre bonheur n’aurait eu aucun besoin si j’étais née pauvre comme lui. Mais l’opinion est là qui veut qu’un homme très-délicat et très-digne ne soit pas l’obligé, et, selon elle, l’inférieur de sa femme.

— Comment ! vous reconnaissez la loi d’un pareil préjugé ?

— Oui, je la reconnais, puisque l’homme que j’aime la subit. Si, en toute liberté de conscience, il en eût jugé autrement, j’aurais vu par ses yeux. Mais mon père avait prononcé : ni l’un ni l’autre nous ne pouvions nous croire meilleurs juges que lui.

— Ah ! pauvre Constance ! depuis quatre ans, vous avez dû bien souffrir !

— Oui, sans doute ; mais combien je serais moins heureuse si, n’aimant rien, je n’attendais personne ! Il est des tristesses que l’on peut surmonter, et ma figure doit vous dire que je ne suis ni découragée ni malade. L’attente ne me dévore pas, elle me soutient. Je ne l’avais pas prévue si longue. Lorsque Abel est parti, il se flattait de pouvoir tout terminer en deux