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« Et mon père ajoutait, au rebours de la duchesse, qui nous dit que la raison, c’est la force : la raison, c’est la bonté. »

— Ah ! vous êtes bien sa fille ! dit avec attendrissement la Mozzelli.

— J’essaie d’être sa fille, et depuis que j’ai perdu cet ami incomparable, c’est-à-dire depuis quatre ans, je consacre fidèlement tous les jours une heure à me rappeler ses paroles, à les écrire à mesure qu’elles me reviennent, et à reconstruire ainsi les années de sa vie où j’ai été capable de le comprendre. Cette heure-là, je la choisis dans ma journée, je l’amène ou je la réserve, afin de n’être pas troublée par les devoirs de la vie courante, et d’y bien trouver ce que j’y cherche, la foi, la charité, l’espérance !

« C’était, en trois mots appliqués à tous ses raisonnements et à toutes ses actions, l’unique doctrine de mon père, et je suis arrivée à me dire comme lui, quand je fais comme lui et devant lui mon examen de conscience, que si j’ai ressenti quelque trouble et négligé de faire quelque bien, c’est pour avoir manqué quelque peu d’espérance, de charité ou de foi. « Aussi j’applique la religion de mon âme, autant qu’il m’est possible, à mes sentiments généraux et à mes sentiments particuliers. Je ne veux pas me dire : les hommes sont haïssables ; il n’y en avait qu’un bon, c’était mon père ; ou, s’il en existe encore un après lui, c’est mon fiancé, pas plus que je ne veux me dire : il n’y a pas de femmes irréprochables ; ma mère l’était,