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mettait bien vite, comme font tous ces gens-là ; votre mari se battait avec son rival ; on vous le rapportait mort ou blessé, ou bien il tuait votre amant et vous faisait enfermer dans quelque monastère. Voilà une famille décriée, des enfants abandonnés, une réputation perdue ! Oui, voilà où vous conduisaient les fables, et voilà de quoi vous a préservée l’histoire !

« — Eh bien, maintenant, dis-je à la marquise, me voilà soumise, me voilà calmée ; mais qu’est-ce que je vas devenir, moi ?

« — Ma chère enfant, répondit-elle d’un air pincé, et avec un sourire profond, vous allez élever avec amour votre petite fille, et surtout lui enseigner la raison ! Vous allez conserver une excellente renommée ; que dis-je ? vous allez l’acquérir ; car le monde sait bien que votre époux dédaigne vos perfections pour s’abrutir dans les ronds de jambe, et votre sagesse brille d’autant plus qu’elle est moins appréciée par lui. Vous allez être en vue pour cela, et on vous trouvera d’autant plus charmante que votre rivale est marquée de la petite vérole et plus âgée que vous de dix ans. Enfin, vous allez être belle, vraiment belle, comme le sont les femmes qui ont un peu aimé, un peu souffert, un peu pleuré, et qui se sont arrêtées à temps. Ne vous eussé-je pas rendu d’autre service que celui de conserver vos yeux purs et votre teint uni, je serais encore une bonne fée pour vous, puisque le premier don des marraines à baguette, c’est toujours la beauté.