Page:Sand - Constance Verrier.djvu/101

Cette page n’a pas encore été corrigée

pareil mariage, vous qui avez trouvé cela au faîte de la société, vous défendiez les hommes contre mes reproches ?

— Prenez patience, répondit la duchesse ; je vous prouverai peut-être que j’avais tort et que mon mari avait raison.

— Vraiment ? dit Constance d’un air de doute.

— Laissez-moi raconter, et vous conclurez. Mon duc n’était pas une âme de glace. Il aimait. Seulement, ce n’est pas moi qu’il aimait, et ceci ne dépendait pas de lui.

« Il aimait une danseuse de l’Opéra, une créature charmante, une déesse : vous voyez, Sofia, que toutes les grandes dames ne sont pas injustes envers leurs rivales, même quand elles sont au théâtre. La première fois que je vis danser cette péri, je l’admirai sans réserve et je me retournai instinctivement vers le duc. Il se retenait d’applaudir, mais il était horriblement ému ; un tremblement convulsif agitait ses mains gantées ; des larmes, de vraies larmes coulaient de ses beaux yeux noyés dans l’ivresse… Que voulez-vous ? cette divinité avait fait une si étonnante pirouette ! »

— Étiez-vous déjà philosophe à ce point-là ? dit mademoiselle Verrier.

— Non, à coup sûr, répondit la duchesse, mais j’étais douce et résignée, habituée d’ailleurs à me vaincre et parfaitement rangée au joug des convenances. Je ne fis paraître aucune surprise, aucun dépit, et le duc ne se douta pas de ma découverte.