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sa puissance sur lui-même, que dans tous les cas il était prêt à s’intéresser à mon neveu dès la moindre sommation de ma part.

Je devais me tenir pour satisfaite, et je feignis de l’être ; mais la précoce indépendance de Paul me rendait un peu soucieuse. Je faisais de tristes réflexions sur l’esprit d’individualisme qui s’empare de plus en plus de la jeunesse. Je voyais, d’une part, Césarine s’arrangeant, avec des calculs instinctifs assez profonds, pour gouverner tout le monde. D’autre part, je voyais Paul se mettant en mesure, avec une hauteur peut-être irréfléchie, de n’être dirigé par personne. Que mon élève, gâtée par le bonheur, crût que tout avait été créé pour elle, c’était d’une logique fatale, inhérente à sa position ; mais que mon pauvre filleul, aux prises avec l’inconnu, déclarât qu’il ferait sa place tout seul et sans aide, cela me semblait une outrecuidance dangereuse, et j’attendais son premier échec pour le ramener à moi comme à son guide naturel.

Peu à peu, l’influence de Césarine agissant à la sourdine et sans relâche, aidée du secret désir de sa tante Helmina, les relations que sa mère lui avait créées se renouèrent. Les échanges de visites devinrent plus fréquents ; des personnes qu’on n’avait pas vues depuis un an furent adroitement ramenées : on accepta quelques invitations d’intimité, et à la fin du deuil on parla de payer les affabilités dont on avait été l’objet en rouvrant les petits salons et en donnant de modestes dîners aux personnes les plus