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tout sur le compte du chagrin qu’elle avait de quitter la maison paternelle et nous accabla de tendres caresses.

Le lendemain, elle partait seule avec son mari, et j’allai m’établir rue de Vaugirard. Comme je quittais l’hôtel, je fus surprise de voir Bertrand qui me saluait d’un air cérémonieux.

— Comment, lui dis-je, vous n’avez pas suivi la marquise ?

— Non, mademoiselle, répondit-il, j’ai pris congé d’elle ce matin.

— Est-ce possible ? Et pourquoi donc ?

— Parce qu’elle m’a fait porter avant-hier une lettre que je n’approuve pas.

— Vous en saviez donc le contenu ?

— À moins de l’ouvrir, ce que mademoiselle ne suppose certainement pas, je ne pouvais pas le connaître ; mais, à la manière dont M. Paul l’a reçue en me disant d’un ton sec qu’il n’y avait pas de réponse, et à l’obstination que madame la marquise a mise hier à vouloir le trouver dans son bureau, à son chagrin, à sa colère, j’ai vu que, pour la première fois de sa vie, elle faisait une chose qui n’était pas digne, et que sa confiance en moi commençait à me dégrader. Je lui ai demandé à me retirer ; elle a refusé, ne pouvant pas supposer qu’un homme aussi dévoué que moi pût lui résister. J’ai tenu bon, ce qui l’a beaucoup offensée ; elle m’a traité d’ingrat, j’ai été forcé de lui dire que ma discrétion lui prouverait ma reconnaissance. Elle m’a parlé plus doucement, mais j’étais blessé, et j’ai refusé toute augmentation de gages, toute gratification.