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les êtres dont on se charge, même les plus infimes, et surtout les plus faibles.

— Qu’est-ce que le bonheur d’un être qui ne songe qu’à manger ? reprit-elle en haussant doucement les épaules.

— C’est de manger. Les enfants à la mamelle n’ont point d’autre souci. Faut-il les faire jeûner pour qu’ils s’attachent à leur nourrice ?

— Mon père doit le penser.

— Il ne le pense pas, vous ne le pensez pas non plus. Pourquoi cette taquinerie obstinée contre votre père absent ? Admettons que sa méthode ne soit pas incontestable…

— Voilà ce que je voulais vous faire dire !

— Et c’est pour cela que vous torturiez votre petit oiseau ?

— Non, je n’y songeais pas ; je voulais me rendre nécessaire, moi exclusivement, à son existence ; mais c’est prendre trop de peine pour une aussi sotte bête, et, puisqu’il a des ailes, je vais lui donner la volée.

— Attendez ! Dites-moi toute votre idée ; en le rendant à la liberté, faites-vous un sacrifice ?

— Ah ! vous voulez me disséquer, ma bonne amie ?

— Je tiens à ce que vous vous rendiez compte de vous-même.

— Je me connais.

— Je n’en crois rien.

— Vous pensez que c’est impossible à mon âge ? Est-ce que vous ne m’y poussez pas en m’interrogeant sans cesse ? Cette curiosité que vous avez de