Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/148

Cette page n’a pas encore été corrigée

uns des autres et qui l’emportaient toujours au delà du vrai, Paul était un peu fatigué déjà de ses inquiétudes sans issue, de sa jalousie sans objet, en un mot de ce fonds d’injustice et de récrimination dont une femme déchue sait rarement se défendre. Je sortis avec lui ce jour-là, et je lui reprochai de traiter Marguerite un peu trop comme une enfant.

— Puisque ce malheureux lien existe, lui dis-je, et que tu crois ne devoir jamais le rompre, tâche de le rendre moins douloureux. Élève les idées de cette pauvre femme, adoucis les aspérités de son caractère. Il ne me semble pas que tu lui dises ce qu’il faudrait lui dire pour qu’au lieu de déplorer le sort que tu lui as fait, elle le comprenne et le bénisse.

— J’ai dit tout ce qu’on peut dire, répondit-il ; mais c’est tous les jours à recommencer. Les vrais enfants s’instruisent et progressent à toute heure, je le vois déjà par mon fils ; mais les filles dont le développement a été une chute n’apprennent plus rien. Marguerite ne changera pas, c’est à moi d’apprendre à supporter ses défauts. Ce qu’elle ne peut pas obtenir d’elle-même, il faut que je l’obtienne de moi, et j’y travaille. Je me ferai une patience et une douceur à toute épreuve. Soyez sûre qu’il n’y a pas d’autre remède : c’est pénible et agaçant quelquefois ; mais qui peut se vanter d’être parfaitement heureux en ménage ? Je pourrais être très-légitimement marié avec une femme jalouse, de même que je pourrais être pour Marguerite un amant soupçonneux et tyrannique. Croyez bien, ma tante, que dans ce mauvais