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s’il le faut, plutôt que de laisser échapper ma proie !

— Et après ?…

— Après, je n’attendrai pas qu’on me traîne devant les tribunaux, je ferai justice de moi-même.

En parlant ainsi, le marquis, pâle et les yeux remplis d’un feu sombre, avait pris son chapeau ; je m’efforçai en vain de le retenir.

— Où allez-vous ? lui dis-je, vous ne pouvez vous en prendre à personne.

— Je vais, répondit-il, me constituer l’espion et le geôlier de Césarine. Elle ne fera plus un pas, elle n’écrira plus un mot que je ne le sache !

Et il sortit, me repoussant presque de force.

Je courus chez Césarine, qui était déjà couchée et à moitié endormie. Elle avait le sommeil prompt et calme des personnes dont la conscience est parfaitement pure ou complètement muette. Je lui racontai ce qui venait de se passer ; elle m’écouta presque en souriant.

— Allons, dit-elle, je lui rends mon estime, à ce pauvre Rivonnière ! Je ne croyais pas avoir affaire à un amour si énergique. Cette fureur me plaît mieux que sa plate soumission. Je commence à croire qu’il mérite réellement mon amitié.

— Et peut-être ton amour ?

— Qui sait ? dit-elle en bâillant ; peut-être ! Allons ! j’essayerai d’oublier ton neveu. Écris donc vite un mot pour que le marquis ne se tue pas cette nuit. Dis-lui que je n’ai rien résolu du tout.