Page:Sand - Cadio.djvu/94

Cette page n’a pas encore été corrigée

arrivée. Personne ici n’est capable de me trahir, et je comptais sur Rebec, à qui je me serais confiée ce soir, pour me laisser cachée un jour ou deux dans la maison ; mais je suis perdue, puisque vous voilà !

HENRI. Perdue ? à cause de moi ? Non certes !

LOUISE. Henri, tout ce que vous avez dit à votre chef ici, tout à l’heure, je l’ai entendu ! Dites-moi que vous n’en pensiez pas un mot, que vous vous êtes méfié de lui… Vous auriez eu tort. Il était sincère, j’en suis persuadée…

HENRI. Louise, je suis sincère aussi, moi ! je n’ai pas deux paroles.

LOUISE. C’est impossible. Voyons, le temps presse : la vérité, Henri, il me la faut ! Je sais bien qu’autrefois tu avais des idées qui n’étaient pas les miennes, mais tu te laissais ramener, et, cette fois encore, cette fois surtout, en apprenant que mon père, ton ami, ton bienfaiteur, est dans le plus grand danger, en me voyant, moi, sous ces habits, dans la dernière détresse, réduite à me cacher dans ma propre maison, où tout me menace et me révolte… Non, non, tu ne vas pas rester avec nos ennemis, tu ne vas pas m’abandonner ! Tu feras comme Marie, cette simple et digne amie qui sacrifie la politique à l’amitié. Tu me reconduiras auprès de mon père, et, quand nous aurons franchi la Loire, puisqu’il faut la franchir bientôt, tu nous aideras à tenter un dernier effort. Si nous succombons dans cette lutte suprême, eh bien, nous périrons ou nous fuirons ensemble. Une famille unie et respectable comme la nôtre peut-elle se séparer dans la mort ou dans l’exil ? Allons, viens ; ce brave officier qui était là te l’a permis, il te l’a conseillé. Il voyait mieux que toi ton vrai, ton seul devoir. Tu as