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autre point de la presqu’île ou à la côte, si tu veux.

SAINT-GUELTAS, égaré. Je t’ai écoutée, et je veux te donner cette dernière satisfaction d’apprendre que tu m’as tenté ; cela te réhabilite un peu. Tu es bien le diable, je te reconnais, à présent ; mais le diable donne de mauvais conseils quand il a été trop écouté. Il faut savoir se délivrer de lui à temps, et… (Levant sur elle la crosse de son pistolet.) voilà qui te prouve que je suis plus fort que le diable !

LA KORIGANE, lui arrêtant le bras. Maître, je sais qu’il faut que je m’en aille ! Tu as assez de moi, j’en ai assez aussi ! Ne verse pas mon sang,… il ne faut pas tuer qui vous aime, — on en meurt ! Laisse-moi me condamner toute seule, tu pourras penser à moi et m’estimer encore. D’ailleurs, c’est par l’eau que je dois périr, puisque j’ai fait périr par l’eau l’enfant innocent ! Adieu ! maître ! — Ah !… Cadio ! voilà ce que tu m’avais prédit !… (Elle croise ses bras sur sa poitrine et s’élance dans la mer qui bat le pied du rocher.)

SAINT-GUELTAS, la regardant disparaître. J’eusse mieux fait de l’écouter ! J’aurais sauvé l’expédition, moi ! Mon scrupule perd la royauté et rend ma vie inutile ! (Il arme son pistolet pour se brûler la cervelle ; puis, après un moment d’hésitation.) Non ! il me faut une glorieuse mort !