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nos jalousies, l’incapacité de nos chefs et le découragement de nos partisans, sans compter la malencontreuse arrivée de ces paysans effarés et affamés, voilà ce que nos alliés ne pouvaient prévoir et ne peuvent empêcher. Voyons, il faut demander une barque, et à tout risque nous faire conduire à la côte. Les républicains ne sont pas partout, que diable ! et nous trouverons bien moyen de rejoindre Vauban ou quelque autre corps en rase campagne.

SAINT-GUELTAS. Libre à toi d’aller te mettre sous les ordres de M. de Vauban ou de M. Georges ; mais Saint-Gueltas ne reçoit pas d’ordres, il en donne.

RABOISSON. L’orgueil n’est pas de saison dans un moment aussi critique. Je servirai comme simple soldat, si je sers ainsi à quelque chose. Toi, tu retrouveras d’autres bandes de chouans qui probablement t’appellent et te cherchent.

SAINT-GUELTAS. Commander à des chouans ? Non, plus jamais ! J’aimerais mieux une armée de peaux-rouges ou de cannibales. Jamais je ne leur pardonnerai d’avoir porté la main sur moi ! J’ai été forcé d’en tuer trois ou quatre ; après quoi, écrasé sous le nombre…

RABOISSON. Il y a là quelque chose d’inexpliqué. Que ne te laissaient-ils tuer Cadio ?

SAINT-GUELTAS. Tu ne les connais pas ! ils ont contre le duel la même prévention que contre les combats à découvert. Tout ce qui est lutte à force égale répugne à leur lâcheté. Ils n’ont pas voulu me laisser tenter le diable, comme ils disent.

RABOISSON. Mais qui leur a dit que tu allais te battre en duel ?

SAINT-GUELTAS. Je m’en doute. Je le saurai plus