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la tempête ! Un petit démon à tête de singe marchait derrière elle, tenant sa robe déguenillée… Mais tu ne vois pas ces choses-là, toi… Quand on rêve d’amour et de bonheur… Où vas-tu ?

LOUISE, qui se dirige vers sa chambre. Je vais m’habiller, il est temps.

ROXANE. Sonne donc la Korigane ! il n’y a pas de lumière, et on ne voit pas ce qu’on fait.

LOUISE. Elle est là, je l’entends. (Elle ouvre la porte, fait un pas dans l’autre chambre, qui est éclairée, revient on jetant un cri d’épouvante, et reste immobile sur le seuil.)

ROXANE. Qu’est-ce que tu as ?

LOUISE, rentrant et fermant la porte brusquement. Rien probablement ! une vision, un rêve ! C’était horrible. (Elle se laisse tomber sur un siége.)

ROXANE. Horrible, quoi ? La dame blanche ? tu l’as vue ?

LOUISE. Un spectre livide, repoussant,… avec mon voile et ma couronne de mariée sur des cheveux gris et sur des haillons sordides, l’épouvante, la mort ! avec mes diamants et mon bouquet sur sa poitrine de squelette ! Et cela grimaçait en riant devant la glace. — Ah ! cette hallucination est un pressentiment, un avertissement peut-être. Ce spectre, c’est ma propre image, c’est le fantôme de ce que je serai pour avoir connu le funeste amour de Saint-Gueltas !

ROXANE, tremblante. Louise, voyons, tu as eu peur, c’est ma faute, c’est parce que je t’ai parlé de la dame blanche ! C’est la Korigane qui est là, je parie, et qui a eu la fantaisie d’essayer ta toilette. Elle est si hardie et si fantasque !

LOUISE. Oui ! cela doit être ; je veux m’en assurer.