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LOUISE. Hélas ! je le sais. Je ne suis pas la compagne qu’il vous faudrait et que vous aviez rêvée.

SAINT-GUELTAS. Je ne vous fais pas de reproches, c’est vous qui vous en faites. Vous sentez bien que cette austérité n’est pas trop de saison dans la circonstance. Allons ! il faut vous en départir un peu. Votre parente, madame de Roseray, est au salon, belle comme un astre, habillée à la romaine ou à la grecque. C’est un peu révolutionnaire, un peu décolleté, cela scandalise ; mais c’est charmant.

LOUISE. Madame de Roseray, votre ancienne maîtresse ?

SAINT-GUELTAS. Qui diable vous a conté ça ?

LOUISE. On me l’a dit.

SAINT-GUELTAS. On s’est moqué de vous, ma chère ! Mais supposons que j’aie été, comme on le prétend, comblé des faveurs de toutes les jolies femmes que vous verrez chez moi, est-ce un sujet de tristesse et d’inquiétude ?

LOUISE. C’est un sujet d’humiliation.

SAINT-GUELTAS. Ah ! permettez ! Si m’appartenir est une honte, vous avez raison : rougissez et baissez les yeux, ma belle maîtresse !… Mais, si, comme vous l’avez pensé dans une heure d’enthousiasme, c’est une gloire de détrôner de nombreuses rivales, prenez votre situation comme un triomphe. Est-ce que je ne m’y prête pas courtoisement en vous jurant fidélité par-devant le prêtre ?

LOUISE. Ah ! vous regrettez votre parole ; vous ne m’aimez déjà plus !

SAINT-GUELTAS. M’aimez-vous réellement, vous qui êtes si injuste ? Si je ne vous aimais plus, je vous aurais laissée mourir, comme vous y étiez décidée. Vous