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MARIE. On ne les poursuit pas ?

HENRI. Nous avons fait notre devoir. La nuit nous a empêchés d’aller plus loin.

MARIE. Mais, demain, vous les poursuivrez encore… Ah ! que vous devez souffrir, vous !

HENRI. Demain, mon détachement se porte sur un autre point. Je n’aurai pas la douleur de frapper moi-même… Mais il s’agit de vous… Vous savez qu’on va vous envoyer…

MARIE. Je sais, je vois, je suis perdue, moi !

HENRI. Non, vous invoquerez l’appui de votre cousin.

MARIE. Quand même on m’en laisserait le temps, je n’aurais pas recours à lui. Si je suis gravement compromise, comme je le pense, je ne veux pas le compromettre. Il est l’unique appui de ma pauvre famille, il est une des gloires, une des forces de la patrie. Au besoin, je nierais notre parenté pour le préserver du soupçon.

HENRI. Appelez-moi en témoignage, au moins.

MARIE. Pas plus que lui vous ne devez avoir à vous disculper, monsieur de Sauvières ! Votre nom est déjà assez difficile à porter sous les drapeaux de la République. Ne me parlez pas davantage ; je sais que vous voudriez me sauver, je vous en remercie. Vous n’y pouvez rien, ne vous exposez pas davantage.

HENRI. Marie, laissez-moi vous parler comme autrefois et vous serrer la main.

MARIE. Non, nous sommes observés ; mais sachez que j’ai pour vous autant d’amitié que d’estime.

HENRI. Je ne peux pas vous laisser partir… Voyons, demandez à parler encore à Chaillac. C’est un esprit étroit, rigide, mais c’est un honnête homme.