Page:Sand - Antonia.djvu/89

Cette page n’a pas encore été corrigée

— C’est mon secret. Vous le saurez plus tard, si je n’échoue pas.

— Ah ! mon Dieu ! dit madame Thierry rompant les chiens, j’ai oublié ma tabatière ; va donc me la chercher, Julien !

Julien monta, et sa mère profita de ce moment qu’elle s’était ménagé pour dire vite à Marcel :

— Prends garde, mon cher enfant ! un grand malheur nous menace : Julien est amoureux de la comtesse !

— Allons donc ! s’écria Marcel stupéfait ; vous rêvez cela, ma bonne tante, c’est impossible !

— Parle plus bas. C’est possible, cela est. Fais-nous quitter bien vite ce dangereux logis. Trouve un moyen, sans qu’il se doute de ce que je te dis là. Sauve-le, sauve-moi ! Silence ! le voilà qui redescend ! Julien avait fait la commission en un instant. Il était pressé de reprendre l’entretien ; mais il trouva quelque chose de contraint dans le regard de sa mère, quelque chose d’étonné et de troublé dans l’attitude de Marcel. Il devina qu’il s’était trahi et prit aussitôt un air d’enjouement et d’indifférence qui ne trompa plus madame Thierry, mais qui rassura le procureur. Celui-ci se retira donc en se promettant de le sonder, mais en se persuadant que sa tante, au milieu de toutes ses émotions, perdait un peu la tête.

Mais Marcel fit bientôt une découverte plus étonnante, si étonnante réellement, que nous prions nos lecteurs de s’y préparer un peu longtemps d’avance.

L’oncle Antoine rendit sa visite à madame d’Estrelle.