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— Presque tout le monde ; mais j’ai affaire à des idiots. Signez, signez, allons !

— Non, c’est comme si tu chantais. Ma parole vaut de l’or ; tant pis pour qui en doute.

— Alors voyez le créancier acquéreur de la maison de Sèvres, il s’en contentera certainement ; mais, jusque-là, il doutera de mes pouvoirs.

— Tu as donc une mauvaise réputation ?

— Apparemment.

— Comme tu dis ça, toi !

— Que voulez-vous que je vous dise ? Si je vous disais le contraire, vous ne signeriez pas, et je veux vous faire signer.

— Ah ! tu veux !… Et pourquoi ?

— Parce que ça m’ennuie, me fatigue et me dérange de retourner à Sèvres pour attendre qu’on se décide à venir vous trouver, tandis que l’envoi de ce papier par mon clerc lèvera toutes les difficultés et m’épargnera des pas et de la dépense. Y sommes-nous ?

— Tu fais de moi ce que tu veux, répondit l’armateur en prenant la plume. Il la trempa trois fois dans l’encre sans se décider, lut et relut la pièce qui le faisait débiteur responsable d’un reliquat de six mille livres dans la succession de son frère, regarda Marcel dans les yeux pour voir s’il était inquiet ou pressé, et, le voyant impassible, il renonça à regret au plaisir de le faire enrager. Il signa et lui jeta l’acte au visage avec un mauvais rire, en lui disant :