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dans l’attitude la plus piteuse que l’on puisse attribuer au désappointement.

Julie avait entendu l’arrivée bruyante de la marquise dans l’atelier. Julien était monté pour dire à sa mère qu’une folle était là faisant rage. Il avait été surpris d’abord de voir Julie et désolé ensuite de sa présence, en apprenant d’elle que cette folle était la douairière en personne. Julie la connaissait enfin et savait bien qu’elle viendrait la relancer jusqu’au grenier. Elle avait pris son parti sur-le-champ, et, s’emparant du bras de madame Thierry, elle lui avait dit :

— Venez ! il ne me sied pas d’être surprise chez vous comme une coupable qui se cache. J’aime mieux braver l’orage, et je sens que je peux le braver parce que je le dois.

Julien, éperdu et prêt à éclater, était resté sur le haut de l’escalier, écoutant et se demandant si Marcel tout seul réussirait à empêcher les deux femmes qu’il aimait et respectait le plus au monde d’être insultées par une furie.

Mais, chose inattendue, dès que la douairière se vit en présence de ces deux femmes, son visage s’éclaircit, et sa colère parut se dissiper. Que voulait-elle en effet ? Constater par ses propres yeux qu’on ne l’avait pas trompée en lui disant que Julie avait fait amitié avec la veuve Thierry et qu’elle était, par conséquent, la maîtresse de son fils. La conséquence était un peu forcée ; mais, Julien ayant dit à la marquise qu’il ne