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armoiries. C’est bien fait, je le sens, je le reconnais ; je me repens, mais je ne veux pas qu’on me plaigne, et j’accepterai sans discussion l’aumône que les parents de mon mari voudront bien me faire pour sauver son honneur.

Un silence d’étonnement et d’émotion succéda à cette déclaration de Julie d’Estrelle. Elle avait parlé avec un accent de douleur mal contenue, comme une personne lasse de discuter des intérêts matériels, qui cède au besoin de résumer sa vie morale et de trouver la formule philosophique de sa situation. La fière Amélie d’Ancourt fut plus scandalisée qu’attendrie d’un aveu qui condamnait ses propres idées et les habitudes de sa caste ; de plus, elle trouva cet épanchement de son amie un peu risqué en présence d’un petit robin.

Quant au robin, il fut franchement attendri ; mais il n’en fit rien paraître, habitué qu’il était à voir les explosions du sentiment intime dominer les convenances, même chez les gens les plus haut placés.

— C’est une touchante et sincère créature que ma belle cliente, se dit-il en lui-même ; elle a raison de s’accuser ; il n’y a pas de loi humaine qui puisse faire sortir un oui de la bouche résolue à dire non. Elle a péché comme les autres, par convoitise des joujoux qui brillent ; mais elle l’avoue tristement, et en cela elle vaut mieux que la plupart de ses pareilles. Ce n’est pas à moi de la consoler ; je me bornerai à la sauver, si je peux. — Madame, dit-il après avoir