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— Après lui ?… reprit Marcel. C’est le diable qui est après lui, je veux dire à ses trousses. Sa femme ne vaut rien, j’ai peur d’elle ; elle ne vous aime pas et elle ne vous est rien, puisque votre époux n’était pas son fils.

— Mon Dieu, vous voyez tout en noir, mon cher procureur ! Le marquis n’est ni très-vieux ni très-malade. Il doit avoir fait son testament. La marquise est dévote, et ce qu’elle ne ferait pas par tendresse, elle le fera par devoir. Ne me découragez pas, vous qui m’avez toujours soutenue.

— Je ne me découragerais pas, moi, si je pouvais mettre la main sur mon original d’oncle ! Qu’il achète et paye le pavillon, nous gagnons un ou deux mois de trêve. Nous avons le temps de vendre ou de céder à prix débattu la petite ferme du Beauvoisis, sinon on nous exproprie brutalement, et nous perdons cent pour cent sur ces bribes encore précieuses aujourd’hui !

Julie, qui, en d’autres moments, s’était beaucoup préoccupée de sa situation, était arrivée à cet état de lassitude qui tient lieu de courage. Elle était d’une philosophie qui étonnait et impatientait Marcel.

— Le diable m’emporte, disait-il tout bas à la mère de Julien, on jurerait qu’à présent elle ne demande pas mieux que d’être mise sur le pavé !

Était-ce là, en effet, la secrète pensée de madame d’Estrelle ? Se disait-elle que, pauvre et abandonnée de la famille de son mari, elle ne devrait plus