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— Je dis,… je dis les choses comme elles sont. Mademoiselle de Meuil était aussi fière que vous pouvez l’être ; mon frère André lui en a conté, et il a fini par se faire entendre. Tous les hommes et toutes les femmes sont faits du même bois, allez ! Il n’y a qu’un mot qui serve : Julien vous plaît-il, oui ou non ?

— Monsieur Thierry, si je ne connaissais votre bon cœur, votre mauvais ton me révolterait ! Veuillez me parler autrement, ou je vous quitte.

— Ah ! vous avez envie de vous fâcher ? La fierté vous reprend, et vous allez me tourner le dos ? Pourquoi ? Tout cela ne vous regarde pas, vous ! Julien a fait la sottise, c’est à lui de la payer.

— Non, monsieur Thierry, c’est à moi… Je suis la cause maladroite de l’accident ; si je n’avais pas admiré et vanté cette fleur d’une manière indiscrète… Il s’est cru obligé de me l’offrir,… la politesse…

— Mauvaises raisons, mauvaises raisons, ma belle dame ! Le drôle savait fort bien que j’aurais jeté à vos pieds la fleur, la plante, le jardin et le jardinier par-dessus le marché. S’il ne le savait pas, il devait le deviner, et, dans tous les cas, il n’avait pas le droit de faire le galant avec mon bien ; c’est un rapt, c’est un abus de confiance et un vol. Il s’en mordra les doigts, et sa chère maman saura ce qu’il en coûte d’avoir un fils élevé à faire mal à propos l’homme de cour avec les grandes dames.

— Voyons, mon voisin, s’écria madame d’Estrelle désolée et impatientée, vous n’allez pas leur retirer