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Narration.


Le lendemain de la journée que d’Argères avait racontée à son ami, récit qui resta dans ses papiers, Laure de Monteluz, un instant secouée par les larmes qu’avaient provoquées des chants véritablement admirables, retomba dans son inertie, et d’Argères la trouva rentrée dans son marbre comme une Galathée déjà lasse de vivre. Disons quelques mots de ce jeune homme que Comtois et Toinette trouvaient si cruellement mystérieux.

Il avait eu ce qu’on appelle une jeunesse orageuse. Beau, intelligent, richement doué, confiant, prodigue, impressionnable, il avait mangé son patrimoine. Forcé de travailler pour vivre, il n’en avait pas été plus malheureux. Malgré quelques douleurs et quelques traverses passagères, tout lui avait souri dans la vie : l’art, le succès, le gain, les femmes surtout. En cela son existence ressemblait à celle de tous les artistes d’élite, de tous les hommes favorisés par la nature, accueillis et adoptés par le monde.