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l’accompagnai, monsieur ; oh ! je ne l’ai jamais quittée ! Sa pauvre mère me l’avait trop bien confiée en mourant ! Nous fûmes envoyées à Paris au couvent du Sacré-Cœur, où mademoiselle eut une chambre particulière, et où il me fut permis de la servir et de lui faire compagnie après les classes. Mademoiselle était adorée des religieuses et de ses compagnes. Elle était des premières dans toutes les études. Elle réussissait dans les arts mieux que toutes les autres, et elle avait l’air de ne pas s’en douter, ce dont on lui savait un gré infini. Mais son plus grand plaisir était de venir causer avec moi. Et de qui causions-nous, je vous le demande ? D’Octave, toujours d’Octave ! Il n’y avait pas moyen de faire autrement, car c’était un grand amour, une sainte passion que l’absence augmentait au lieu de la diminuer. Quand mademoiselle chantait ou étudiait son piano :

» — Cela fera plaisir à Octave, disait-elle ; il aime la musique.

» Si elle dessinait ou apprenait les langues, la poésie :

» — Il aimera tout cela, disait-elle encore. »

» Enfin, tout était pour lui, et c’est à lui qu’elle pensait sans cesse. Elle lui écrivait des lettres. Ah ! monsieur, quelles jolies lettres ! si enfant, si honnêtes et si tendres ! Il n’y a pas de roman où j’en aie jamais trouvé de pareilles. Madame de Monteluz m’avait bien défendu