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égoïste et ne veut dépendre de personne. Le pays où nous sommes est fort vilain. On y perd ses chaussures. C’est un désert où il n’y a que des rochers, des bois, des eaux qui tombent des rochers, et pas une âme à qui parler, car il règne dans le pays une espèce de patois, et les gens sont tout à fait sauvages.

La maison est agréable et bien tenue. Le vin est rude. Le cocher est très-grossier. M. de West est assez riche et fait des ouvrages pour son plaisir. On dit qu’il y met beaucoup d’amour-propre. Sans doute que monsieur se mêle d’écrire aussi, car le valet de chambre m’a dit que son maître lui avait dit :

— Vous me donnerez des conseils.

Mais je ne crois pas monsieur capable d’écrire avec esprit. Il aime trop à courir, et, d’ailleurs, il parle trop simplement.

C’est toujours un travers de vouloir écrire après M. Helvétius, M. Voltaire et M. Pigault-Lebrun, qui ont fait la gloire de leur siècle. Tout ce qui peut être écrit a été écrit par des gens très-illustres, et, comme disait une dame de beaucoup de talent, dont je faisais les lettres à ses amis, il n’y a plus rien de nouveau à imprimer. Au moins, si ces messieurs s’occupaient de politique ! C’est un horizon qui change et qui vous présente toujours du neuf. Mais, pour juger la politique, il faut aller à la cour, et je ne crois pas que monsieur soit