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pouvoir plus se reprendre, qu’elle était réellement tremblante à la pensée de se donner. Elle se faisait de l’amour partagé une si haute idée, qu’elle avait comme une terreur religieuse à l’entrée du sanctuaire. Plus jalouse d’elle-même qu’Adriani ne se sentait fondé à l’être, elle craignait d’apercevoir dans ses souvenirs l’ombre d’Octave la disputant à un nouvel amour. Et, comme chaque jour atténuait cette image pour grandir celle d’Adriani, comme chaque point de comparaison était à l’avantage triomphant et incontestable de ce dernier, elle se disait que, plus elle attendrait, plus elle serait digne de lui. Elle eût regardé comme un crime, envers cet amant si abandonné à son empire, de récompenser tant de flamme pure par une tendresse équivoque ou insuffisante.

— Non, non, lui dit-elle à la fin de la semaine promise, je ne veux pas vous aimer à demi. Une passion qui n’est pas payée par une passion équivalente est un supplice. À Dieu ne plaise que je vous le fasse connaître ! Attendons encore. Ne sommes-nous pas bien ici ?

Adriani, qui craignait qu’elle ne parlât de séparation, la remercia avec ivresse. Elle prit son bras et lui dit ;

— Sortons de l’enclos ; vous me l’avez fait si joli et si précieux, que je m’y trouve bien ; mais je me souviens maintenant de m’y être enfermée volontairement par suite de je ne sais qu’elle manie monastique. Je veux