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sur la destinée d’Adriani. Laure lui avait fait promettre de ne lui adresser aucune question sur l’avenir, pendant toute la semaine qu’elle venait lui consacrer. Elle consentait à l’écouter plaider la cause de son amour, à mettre à l’épreuve sa soumission et son dévouement de tous les instants. Était-elle encore incertaine au dedans d’elle-même ? Pouvait-elle résister à tant d’éloquence vraie, à tant d’attentions exquises, à tant de respects et de charmes d’intimité que l’artiste sut mettre au service de sa passion ? Et si elle n’y résistait plus intérieurement, si elle prenait confiance en elle-même, si elle associait son avenir au sien, pourquoi tardait-elle à le lui dire ? Parfois Adriani, dont l’âme jeune et bouillante avait peine à s’identifier aux accablements de cette âme éprouvée, s’imagina que Laure obéissait à un instinct de coquetterie légitime et retardait sa joie pour lui en faire sentir le prix. Il en fut heureux et fier : cette douce et naïve fierté de Laure lui semblait le réveil de la nature dans le cœur de la femme.

Mais il n’en était point encore ainsi. Laure était plus parfaite et moins heureuse qu’elle ne semblait. Elle ne faisait ni désirer ni attendre ; elle attendait, elle désirait encore elle-même le réveil complet de son être. Il y avait en elle une ténacité singulière et difficile à vaincre, pour une situation donnée dans la vie morale. Aveuglément dévouée dans ses affections, elle savait si bien ne