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Il la commença avec abattement ; il la termina en la baisant avec transport. Quel plus doux aveu pouvait-il recevoir que cette confession ? De quel plus grand charme Laure pouvait-elle se revêtir à ses yeux que de lui avouer, dans son repentir naïf, et sans savoir ce qu’elle avouait, que sa conscience plus que son cœur était fidèle à la mémoire d’Octave, et que ce cœur était vierge d’un amour partagé, par conséquent d’un amour complet ?

Adriani avait déjà pressenti qu’il n’avait pas à lutter contre un mort. Il ne se trompa pas sur la véritable portée de cette lettre ingénue. Il reconnut que l’urne pouvait être couronnée de fleurs et inaugurée par lui, sans amertume, au seuil de son avenir. Laure perdrait ses remords et se relèverait vis-à-vis d’elle-même le jour où elle saurait ce que c’est que le véritable amour, et combien peu elle avait offensé Dieu en le rêvant sur le cœur impuissant d’Octave.

Ainsi, en croyant décourager Adriani et l’éloigner d’elle, Laure avait resserré le lien qu’elle voulait rompre. L’extrême candeur agit souvent comme ferait l’extrême habileté. Elle obéit à la loi du vrai d’une manière toute fatale. Si la ruse prend le masque de la loyauté, c’est parce qu’elle sait bien que la loyauté est le seul pouvoir infaillible sur les bons esprits.