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de l’amour. Elle crut à une inégalité de caractère qu’elle accepta avec son inaltérable douceur, résultat d’un magnifique équilibre dans sa propre organisation. Mais, peu à peu, elle s’effraya mortellement de ces lacunes dans les soins de son mari. Octave était une espèce de sauvage inculte et incultivable. Les talents et l’intelligence de sa femme lui inspiraient un respect naïf, une vanité de paysan qui écarquille les yeux en voyant sa petite fille lire et écrire ; mais il eût vainement essayé de comprendre et de sentir ; il n’essaya point.

Laure n’eut point le sot amour-propre de s’en trouver blessée. Quand elle le voyait s’endormir auprès de son piano, elle continuait à le contempler et jouait comme sur du velours, ou chantait de la voix d’une mère qui berce son enfant. Si Toinette, qui était imprudemment épilogueuse dans ses jours de gaieté, lui disait : « Hélas ! madame, à quoi bon avoir appris tant de belles choses ? » elle lui répondait avec un sourire d’ange : « Cela sert peut-être à lui donner de jolis rêves ! » Mais elle voyait bien que l’inaction était le supplice de son jeune mari, et que, faute de pouvoir remplir, seulement une heure, une occupation intellectuelle quelconque, il lui fallait remplir toutes ses journées de mouvement et d’émotions physiques.

Soumis et dévoué d’intention. Octave eût sacrifié ses goûts à la société de sa femme. Il le tenta même dans