Page:Sand - Adriani.djvu/117

Cette page n’a pas encore été corrigée

sante s’armait d’une volonté capable d’exercer une sorte d’ascendant magnétique.

— Eh bien, répondit-elle, le suicide moral a de plus grands attraits encore que le suicide matériel, si on s’y laissait aller… Il y a dans l’oubli de la réalité, dans le rêve du néant, dans le trouble de la folie, un charme épouvantable qui semble parfois la récompense et le soulagement promis aux violentes douleurs longtemps comprimées !

— Taisez-vous ! dit d’Argères ; cette pensée doit vous faire frémir. Elle est impie ; chassez-la de votre cœur à jamais ; craignez qu’elle ne soit contagieuse pour ceux qui vous comprendraient !

— Oui, vous avez raison ! répondit-elle vivement en lui saisissant le bras comme si elle eût craint, cette fois, de rouler dans un abîme ouvert sous ses pieds. Vous avez raison ! vous avez une âme vraiment croyante, vous ! vous me parlez comme un père… vous me faites du bien, c’est là ce qu’il faut me dire ! Et quoi encore ? Parlez-moi, vous me faites du bien !

— Si cela est, s’écria d’Argères en la saisissant dans ses bras et en l’y retenant, vous êtes sauvée, je le jure devant Dieu ! Restez là, sans honte, sans crainte, et reposez cette tête malade sur un cœur plein de jeunesse et de force ! Fiez-vous à moi qui ne vous demande rien et qui ne pourrais rien vouloir de vous que ce que vous