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je crois aussi à nos devoirs sur la terre. Jusqu’à mon dernier jour de lucidité, je me défendrai de mon mieux contre les vertiges qui m’envahissent. Vous voyez bien que je le fais ; vous exigez que je parle de moi, et j’en parle ! C’est pourtant la chose la plus difficile et la plus pénible que je puisse me commander à moi-même.

— Vous avez raison de le faire, et je ne veux pas vous en remercier. Ce n’est pas pour moi que vous le faites : c’est pour vous ; dites avec vérité que c’est pour vous !

— C’est pour ma famille, qui est contristée, humiliée et scandalisée de ma situation d’esprit ; c’est surtout pour cette pauvre fille qui me sert, qui ne m’a jamais quittée, qui a ses travers, je le sais, mais dont l’affection et la patience effacent toutes les taches devant Dieu et devant moi ; c’est pour vous en cet instant ! pour vous à qui je ne veux pas léguer, pour remercîment de quelques jours de commisération, l’exemple d’un abandon de moi-même, qui pourrait, si jamais vous êtes malheureux, vous faire croire à l’abandon de Dieu envers ses créatures.

— Ainsi ce n’est pas pour vous-même ?

— Pour moi ?… Ah ! monsieur, vous ne savez pas une chose effrayante… Non, je ne veux pas vous la dire.

— Dites-la ! s’écria d’Argères, dont la passion crois-