Page:Sand - Œuvres illustrées de George Sand, vol 1, 1852.djvu/230

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
80
VALENTINE.




Les métayers de la Croix-Bleue, en allant chercher leurs boeufs, l’ont ramassé. (Page 52.)

Athénaïs, dans sa candeur, ne voulut pas voir dans cette passion, qu’elle connaissait depuis longtemps, le côté délicat, qui eût fait reculer une personne plus prudente. Dans la sincérité de son âme, elle ne croyait pas Valentine capable d’oublier ses principes, et jugeait cet amour aussi pur que celui qu’elle éprouvait pour Valentin. Elle s’abandonna donc à l’élan de la sympathie, et promit qu’elle solliciterait de Valentine une décision moins rigide que celle qu’elle méditait.

— Je ne sais si je réussirai, lui dit-elle avec cette franchise expansive qui la rendait aimable en dépit de ses travers ; mais je vous jure que je travaillerai à votre bonheur comme au mien propre. Puissé-je vous prouver que je n’ai jamais cessé d’être votre amie !

Bénédict, touché de cet élan d’amitié généreuse, lui baisa la main avec reconnaissance. Valentin, qui revenait en ce moment avec l’ombrelle, vit ce mouvement, et devint tour à tour si rouge et si pâle qu’Athénaïs s’en aperçut et perdit elle-même contenance ; mais, tâchant de se donner un air solennel et important :

— Il faudra nous revoir, dit-elle à Bénédict, pour nous entendre sur cette grande affaire. Comme je suis étourdie et maladroite, j’aurai besoin de votre direction. Je viendrai donc demain me promener par ici, et vous dire ce que j’aurai obtenu. Nous aviserons au moyen d’obtenir davantage. À demain !

Et elle s’éloigna légèrement avec un signe de tête amical à son cousin : mais ce n’est pas lui qu’elle regarda en prononçant son dernier mot.

Le lendemain, en effet, ils eurent une nouvelle conférence. Tandis que Valentin errait en avant sur le sentier du bois, Athénaïs raconta à son cousin le peu de succès de ses tentatives. Elle avait trouvé Valentine impénétrable. Cependant elle ne se décourageait pas, et durant toute une semaine elle travailla de tout son pouvoir à rapprocher les deux amants.

La négociation ne marcha pas très-vite. Peut-être la jeune plénipotentiaire n’était-elle pas fâchée de multiplier les conférences dans la prairie. Dans les intervalles de ces causeries avec Bénédict, Valentin se rapprochait, et se consolait d’être exclu du secret en obtenant un sourire et un regard qui valaient plus que mille paroles. Et puis, quand les deux cousins s’étaient tout dit, Valentin courait après les papillons avec Athénaïs, et, tout en fôla-